Quand le sport et la résilience permettent de surmonter les ténèbres

Zohre a grandi en Afghanistan avant de fuir avec sa famille. « Je suis née pendant la guerre, et nous avons fui cette situation avec ma famille. En Iran, où j’ai grandi, je n’avais aucun droit. Je ne suis jamais allée à l’école, je n’avais même pas de papiers d’identité. » Elle n’a donc jamais eu la chance de vivre une enfance « normale ». Arrivée plus tard à Zurich après un long périple par la Grèce, la Turquie et divers pays, elle a été confrontée à l'isolement social et à des souffrances psychologiques dont elle n’avait pas pleinement conscience. « Je me suis retrouvée tellement seule... je ne savais pas pourquoi tout cela m’arrivait et c’était compliqué de faire face à une nouvelle langue, une nouvelle culture. C’est à ce moment-là que des signes de dépression ont commencé à se manifester. »​

Alors qu’elle se battait contre ses démons intérieurs, Zohre a fait une rencontre qui a changé sa vie. Amy, une femme qui travaillait pour une association humanitaire, l’a encouragée à essayer la course à pied. « La première fois que j’y suis allée, c’était horrible et j’y suis allée pour faire plaisir à Amy plus que par conviction. J’avais l’impression que tout le monde me regardait. Mais malgré tout, directement après, je me suis sentie un peu mieux et j’ai continué petit à petit. Très rapidement, il est apparu que le sport commençait à jouer un rôle crucial dans ma guérison. » Pour Zohre, le sport n’a donc pas seulement été un moyen de retrouver une certaine forme physique, mais surtout un outil pour se reconnecter avec elle-même et guérir certaines blessures. « Le sport a l’effet d’un médicament pour moi, sans les effets indésirables de ces derniers. Chaque fois que je me sentais mal, je sortais courir. » Au fil du temps, elle a ainsi pu diminuer sa consommation de produits pharmaceutiques et constater l’amélioration de son état général. « Mais cette démarche ne s'est pas faite du jour au lendemain. Le sport m’a progressivement permis de m’accepter moi-même et d’apprendre à vivre avec mes souffrances », soulignant ici l’importance de persévérer chaque jour. « Cela a aussi été l’occasion de m’ouvrir aux autres et de partager des discussions sur le sport qui nous passionne tous. »

Après avoir découvert la course à pied, Zohre a décidé de repousser encore plus ses limites en s’essayant au triathlon. Son premier Ironman, disputé en Italie en septembre 2024, fut une expérience intense, mais révélatrice : « Quand j’ai franchi la ligne d’arrivée, je me suis dit qu’il n’y a pas de limites et que ceci s’applique autant au sport qu’à la vie en général. » Son prochain objectif est de participer au Norseman Triathlon, l’une des plus difficiles épreuves au monde. « C’est symbolique pour moi. J’ai déjà surmonté l’obscurité dans ma vie, et le Norseman, avec son t-shirt noir de finisher, représente pour moi cette victoire sur les ténèbres. »

Son parcours montre qu’il est possible de se relever après des épreuves aussi difficiles que la guerre, l'exil ou la dépression. « Tout le monde a ses périodes sombres, à son échelle, mais il faut accepter ses souffrances et travailler dessus chaque jour. Ce n’est pas facile, mais rien n’est impossible. Il faut essayer, encore et encore, et ne jamais abandonner. »